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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

M. le Baron contre le Cardinal de Rohan. Vous verrez tout ce que la considération de la Reine et la réputation du clergé français en ont souffert ! Je n’y saurais penser encore aujourd’hui sans irritation. J’ai eu bien de la peine à m’en réconcilier avec M. de Breteuil. — Ne me parlez jamais de la férocité de votre conduite envers ce Prince-Évêque, lui dis-je après sept années de brouillerie. Je vous l’ai pardonnée, j’en conviens ; mais je désire que Dieu vous la pardonne un peu mieux que je ne le saurais faire !

J’ai trouvé dans les lettres que j’ai conservées du Prince Louis un portrait, ou si vous voulez une esquisse de l’Archiduchesse Marie-Antoinette. Il est assez mal écrit, comme tout ce qui provient des gens du monde, et particulièrement des grands seigneurs de ce temps-là ; temps de contagion philosophique et de confusion dans les intelligences, misérable temps, où l’arrogante afféterie d’un Grimm et d’un Chamfort, où les sensibleries et les niaiseries de MM. d’Arnaud-Baculard et Marmontel, assistées des boursoufflures à la Diderot et des platitudes à la Sédaine, avaient tout-à-fait dénaturé le bon sens, le bon style français et le bon goût, qui n’est que l’expression du bon sens. Du reste, il était fidèlement vrai, ce portrait à l’ébauche, il avait le mérite de la ressemblance, et c’est pourquoi je l’ai gardé.


« L’Archiduchesse-Dauphine est d’une taille proportionnée à son âge, maigre sans sécheresse ni disgrâce, ainsi qu’une jeune personne qui n’est pas totalement formée. Elle est parfaitement bien faite, et tous ses mouvemens agréables. Ses cheveux sont d’un blond pur