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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

laquelle consiste à filouter tous ceux qui ne sont pas de leur religion, il ne s’en suivait pas du tout que vous eussiez fait infibuler ni saigner personne des quatre membres. Il a dit : On verra ça ; et votre pauvre mère en a été pour ses frais d’antichambre et de conversation avec ce juif. Mon bon Dieu quel, temps pour y vivre ! Voilà les sujets qui veulent régir les souverains, et les chrétiens qui sont jugés par des juifs : il me semble qu’autant vaudrait faire juger les officiers de louveterie par des loups, n’est-il pas vrai ? Le Marquise avait donc été prise de rhume, et je ne l’ai pu voir mercredi, parce que les rues étaient si remplies de mauvaises gens en si grande émotion, que sur ma place des Victoires et du côté de ma fille, on ne pouvait passer outre, et que je n’ai pu sortir de chez moi. J’ai déjà été arrêté sur cette place du Palais-Royal, et quand j’entends dire pour me faire relâcher que je suis le beau-père de qui vous savez, c’est un si douloureux et si honteux bénéfice pour moi, qu’il me semble en recevoir un coup de stylet au milieu du cœur. Mais retournons à votre procès, car tout le monde a ses afflictions, et vous savez que les vôtres ne sauraient être pour moi des contrariétés minimes. Notre-Dame de bon-secours s’est donc fait habiller jeudi matin à la lumière des bougies, car elle était en course dès sept heures et quart. Voilà ce que l’on a dit chez elle à un de mes gens que j’y avais fait envoyer pour le premier coup de huit heures. Elle avait pris des précautions admirables, et la voilà qui vous fait dire comment elle avait mis tout autant de coqueluches que la Duchesse de Saulx ;