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118 CHAPITRE II. — ANALYSE DE L'ILIADE

poème; car les Achéens donnent complète satisfa(S lion à Achille au neuvième livre en lui accordant tout ce que Thétis avait demandé pour lui, et ils n'en continuent pas moins à subir des désastres par la volonté du dieu suprême; leurs affaires vont même de mal en pis, jusqu'à ce qu'il plaise à Achille d'envoyer Patrocle au combat et ensuite de renoncer à sa colère pour le venger. Zeus fait donc en réalité dans le poème beaucoup plus qu'il n'a promis à Thétis au début, et il vient un moment où il agit par suite d'un engagement qui n'a plus de valeur et qui ne peut plus en avoir. A partir du neuvième livre, il est, pour ainsi dire, à la discrétion d'A- chille, et il semble qu'il appartienne désormais à celui-ci de fixer l'instant où la colère du dieu devra cesser. Si le poète avait su d'avance ce qu'il vou- lait faire dans la suite, si en composant la scène du serment de Zeus il en avait déjà déterminé toutes les conséquences, il n'est pas douteux qu'il n'eût adapté plus exactement les termes de ce serment aux événements futurs. La vérité est qu'il n'entre- voyait encore ceux-ci que confusément.

Le premier livre dans son ensemble nous parait donc révéler chez son auteur l'intention et le projet d'une continuation, mais en excluant l'idée d'un plan arrêté d'avance, par conséquent celle d'un poème à proprement parler. Ce que nous devinons au travers de son œuvre, c'est une conception encore vague de chants futurs qu'il se proposait de tirer successivement de la légende.

Cela étant, le meilleur moyen de reconnaître dans le reste du poème actuel ce qui appartient à ce poète primitif sera toujours de comparer chaque groupe de scènes à celles de ce premier livre. Notons- en donc brièvement les caractères essentiels. Et

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