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516 CHAPITRE XI. - LES TRAVAUX ET LES JOURS

ressortir de la significalion du nom et des choses elles-mêmes. Mais Hésiode, peu soucieux de l'allé- gorie, a traité son sujet comme une simple matière de poésie. Il a préféré le récit lui-même à sa signi- fication cachée, et en se laissant aller à nous décrire la jeune Pandore, il lui a prêté tant de séduction féminine qu'elle est devenue, sans qu'il l'ait voulu peut-être, comme la personnification de la femme; idée qui se dégagera nettement dans la Théogonie^ mais qui est déjà en germe dans les Travaux :

« Sur-le-champ, le glorieux Héphocstos façonna d'un peu de terre une forme semblable à une pudique jeune fille : ainsi le voulait le fils de Gronos. La déesse aux yeux bleus, Athénë, s'empressa elle-même de la ceindre et de draper son vête- ment. Autour de son cou, les divines Charités et lauguste Pitho mirent des colliers d'or ; et sur sa tête, les saisons à la belle chevelure posèrent une couronne de fleurs printanières. Tout cela fut arrangé avec grâce par Pallas Athcné. Dans son sein, le dieu messager, Argiphontès, déposa la tromperie et les discours séduisants et un esprit artificieux. Puis il l'appela femme et Pandore, parce que tous les habitants de TOlympe avaient mis en elle leurs dons, fléaux des hommes in- dustrieux. *»

Le mythe des âges semble bien avoir subi aussi une allération analogue. Il est certain qu'en la forme oîi nous le lisons dans les Travaux^ il ne satisfait pas complètement Tcsprit. L'idée générale est incon- testablement celle d'une dégénérescence à la fois physique et morale, dont chaque phase résulte de la précédente; mais, sans parler de l'inlcrcalalion d'un âge héroïque qui rompt la suite naturelle des choses, on ne peut nier que l'enchaînement des descrip- tions n'ait quelque chose de flottant. Gela ne tien- drait-il pas encore à ce que l'imagination du poète a

1. Travaux, 70-82.

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