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LA LANGUE GRECQUE

déjà fort en usage. À côté des formes archaïques, qui sont ouvertes et décomposées, nous en trouvons d’autres plus récentes et plus resserrées (par exemple les génitifs en ου à côté des génitifs anciens en οιο). On sent que la langue achève alors de se dégager de ses manières primitives et qu’elle tend à un mode d’expression plus concis et plus viril. Ce progrès, malgré certains temps d’arrêt (par exemple chez Hérodote), s’est poursuivi dans la période historique, et le dialecte attique l’a mené à son terme naturel, fort éloigné encore de la gravité un peu pesante du latin[1].

Le système primitif des consonnes a quelque peu souffert de cette facilité de la prononciation. Dès la période préhistorique, le sigma, quand il était simple entre deux voyelles, avait presque complètement disparu ; et le digamma, qui a subsisté longtemps dans le parler populaire et même dans l’orthographe des inscriptions en dehors des pays ioniens et attiques, n’a exercé que peu de temps son influence sur la langue littéraire. Il y avait là le germe d’un inconvénient qui aurait pu devenir grave. Les mots, en s’altérant ainsi, s’éloignaient trop de leur forme primitive, et leurs relations mutuelles devenaient plus obscures ; en outre la prononciation perdait de sa force et par conséquent de sa valeur. Mais un sentiment instinctif des qualités nécessaires du langage empêcha ce double dommage de se produire. Après s’être adoucie et allégée, la langue resta

  1. G. Meyer, Griech. Gramm., Leipzig, 1880, § 122 : Am meisten hat das Ionische Herodots getrennte Vocale geduldet ; am weitesten in der Contraction geht das Attische ; die übrigen Mundarten nehmen eine Mittelstellung ein, stehen aber im Allgemeinen dem Ionischen næher als dem Attischen.