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DE BERNOULLI.

Une inégalité moins marquée lui eût peut-être fait trouver dans sa propre nation quelques rivaux, plus empressés d’obscurcir ses découvertes, que de les faire valoir. En lui laissant toute sa réputation, ils avaient du moins la ressource de croire la partager.

Bernoulli prélendit avec plus de fondement, en 1711, que Newton était tombé dans quelque méprise sur la mesure des forces centrales dans les milieux résistans ; on faisait alors en Angleterre une nouvelle édition de l’ouvrage de ce grand bomme, et il se corrigea sans répondre.

L’année 1714 vit paraître l’excellent Essai d’une nouvelle théorie de la manœuvre des vaisseaux. La manœuvre est principalement fondée sur les lois de la résistance des fluides, et ces lois n’étaient encore que peu connues. Le chevalier Renau, dans un livre qu’il avait publié sur cette matière, s’était écarté des vrais principes ; aussi le chemin qu’il suivait l’avait-il conduit à plusieurs erreurs ; mais ces erreurs étaient assez délicates pour avoir séduit plusieurs savans géomètres. Bernoulli donna dans son essai la vraie théorie de la résistance du fluide aumoavement du vaisseau ; fondé sur cette théorie, il se déclara ouvertement contre celle du chevalier Renau, et contre les conséquences qu’il en tirait. Renau répondit à ses objections, et s’engagea par lettres avec lui dans une dispute très-savante, dispute où la sagacité des deux adversaires ne se fit pas moins admirer que leur politesse mutuelle. Bernoulli montra dans cette occasion qu’il n’ignorait pas les égards qu’il devait à ceux qui en avaient pour lui ; mais n’eût-il pas mieux valu les avoir toujours, et laisser à ses adversaires le triste avantage de les violer seuls ?

Cette même année 1714, il publia dans les mémoires de l’Académie des sciences et dans les journaux de Leipsick ses recherches sur les centres d’oscillation. Plusieurs poids étant attachés à la verge d’un pendule, considérée comme une ligne inflexible, sans pesanteur et sans masse, il est évident que si cette verge vient à faire des vibrations, son mouvement doit être fort différent de celui qu’elle aurait, n’étant chargée que d’un seul corps, car les poids placés à différentes distances, tendent à descendre également dans le même temps ; or cela ne se pourrait faire sans que la verge se brisât ; son inflexibilité exige nécessairement que les poids les plus éloignés du centre de suspension décrivent les plus grands arcs. Les poids feront donc entre eux une espèce de compensation et de réparation de leurs mouveniens ; la vitesse des poids inférieurs sera plus grande, et celle des poids supérieurs sera plus petite, que si chacun d’eux était seul attaché à la verge. Mais quelle doit être la loi de cette répartition et la vitesse