Page:Dante - La Divine Comédie, Le Purgatoire, trad. Ratisbonne, 1865.djvu/34

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Sont-ils anéantis, les décrets de l’abîme ?
Le ciel a- t-il changé ses desseins sur le crime,
Que vous puissiez, damnés, venir en mon séjour ? »

Mon guide me fit signe en me parlant du geste,
De l’œil et de la voix ; j’entendis, et modeste
Je pliai les genoux et je baissai les yeux.

Ensuite il répondit i « De mon chef point n’arrive.
Du ciel est descendue une Dame plaintive ;
J’assistai ce mortel pour complaire à ses vœux.

Mais si tu veux savoir encor mieux qui nous sommes,
Et quel est notre sort dans le troupeau des hommes,
Je vais de tout mon cœur souscrire à ton désir.

Cet homme n’a point vu le soir qui clôt la vie ;
Mais il en fut si près poussé par sa folie
Que son temps était proche et qu’il allait mourir.

Comme je te l’ai dit, pour conjurer sa perte.
Je lui fus envoyé ; la seule route ouverte
Était ce dur chemin où pour lui j’ai marché.

J’ai fait voir à ses yeux toute la gent damnée ;
Maintenant je lui veux montrer la destinée
Des âmes sous ta loi se purgeant du péché.

Comment je l'entraînai, serait trop long à dire
Une vertu d’en haut me soutient et m’inspire
De le conduire ici pour t’entendre et te voir.

Or daigne l’accueillir. Il cherche avec courage
La liberté, ce bien si cher, comme le sage
Qui pour elle renonce au jour doit le savoir.