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INTRODUCTION.

mine le récit du pape, comme la vie se termine par la solitude et le vide !

La passion politique ressaisissant le Poëte, même en ces lieux calmes où viennent s’éteindre les bruits du monde, il évoque Hugues Capet pour mettre en sa bouche la satire de ses descendants, de cette mauvaise plante qui tellement de son ombre couvre la terre chrétienne, que rarement il s’y cueille un bon fruit[1]. Toujours, en effet, leur intervention dans les affaires de l’Italie fut fatale au parti gibelin ; depuis Charles d’Anjou, vainqueur de Manfred, jusqu’à cet autre Charles, qui s’empara de Florence, sans armée, seul avec la lance avec laquelle jouta Judas[2]. Jamais l’indignation n’eut de langage plus âpre, le mépris d’ironie plus amère. La parole, brûlante comme un fer rougi, court sur cette race maudite, exécrée par son auteur même. Le dégoût, l’horreur que lui inspirent les crimes des siens, éclatent en imprécations, jusqu’à ce qu’enfin de sa poitrine oppressée, haletante, sorte ce cri sublime, cri de haine sans doute, mais d’une haine sainte, de cette haine qui a sa racine dans un amour immense du juste et du bien :


O Signor mio quando sarô io lieto
A veder la vendetta, che nascosa
Fa dolce l’ira tua nel tuo segreto !

  1. Purgat. ch. XX, terc. 15.
  2. Ibid., terc. 25.