Page:Dante - Rimes, 1847, trad. Fertiault.djvu/107

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée


Elle a un tel dédain pour quiconque la regarde, qu’elle fait baisser les yeux par crainte, et qu’autour des siens se meut toujours l’image de la plus grande cruauté : mais en eux ils portent la douce figure qui fait dire à l’âme noble : « Merci ! » Elle est si vertueuse que, lorsqu’on la voit, elle fait, aux autres, sortir tous les soupirs du cœur.

Elle semble dire : « Je ne serai douce envers aucun de ceux qui me regardent dans les yeux, parce que je porte ici-dedans le noble Maître qui m’a fait sentir ses traits. » Et certes je crois qu’on les regarde ainsi pour le voir (Amour) dans elle (ses yeux), quand cela plaît ; de telle sorte que la Dame résiste quand on la contemple, pour commander le respect.

Je n’espère pas que par compassion elle daigne jamais regarderun peu son prochain, tant est cruelle dans sa beauté cette Dame qui sent Amour dans ses yeux ; mais qu’autant qu’elle voudra elle cache ses regards, pour que je ne voie jamais ma si grande félicité : par ce moyen mes désirs auront une vertu (force) contre le dédain dont me paye Amour.