Page:Darien - La Belle France.djvu/262

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individuelle de la terre — n’a plus aucune espèce de raison d’être. Son action, à part quelques différences d’expression dans des phrases vides, ne pourrait être que celle des pays qui l’entourent ; cette action devient donc inutile, ou du moins n’a nul besoin de conserver un caractère nominalement particulier ; et les pays voisins ont intérêt, ou à la supprimer, ou à la prendre à leur compte. En dehors d’une œuvre révolutionnaire, il est ridicule de rêver pour la France d’une action qui lui soit propre. Le temps des luttes pour le prestige, pour la gloire militaire, est passé et ne reviendra point. Les conquêtes territoriales sont hors de question. Matériellement, la France est circonscrite par des limites qu’elle ne dépassera pas. Tant qu’elle ne s’est point transformée radicalement, pour quelle idée peut-elle lutter ? Pour aucune. Elle ne peut que donner le spectacle de sa verbeuse impotence. « Il faut vous en aller, vient dire l’Anglais, dès qu’il apprend que le Français s’est installé à Fashoda. Quand vous en allez-vous ? — Je suis en train, dit le Français, de préparer mon Exposition, et les nécessités de la danse du ventre… — Quand vous en allez-vous ? demande l’Anglais. — Vous n’ignorez pas, dit le Français, que j’ai un associé qui est un homme redoutable ; j’ai même récemment doré les lanières de son grand knout… — Quand vous en allez-vous ? demande l’Anglais. — Vous apprendrez, dit le Français, qu’il existe une justice immanente… — Quand vous en allez-vous ? demande l’Anglais. — Il y a des heures dans la vie des peuples, dit le Français, qui sont… — Quand vous en allez-vous ? » demande l’Anglais. Le Français s’en va.

Sans aucun profit possible pour elle-même, la France est devenue une cause de gêne et d’ennui pour les peuples voisins. Elle semble avoir perdu toute conscience de sa raison d’être ; elle n’a même pas le courage de revendiquer, comme c’est son droit, l’honneur d’un sang germanique. Elle s’avoue latine ; se proclame latine ; se traîne, dans l’ordure de ce mensonge, aux pieds d’un vieux comédien coiffé d’une tiare, qui la prostitue à un cosaque.