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les forces du pays sont nécessaires à son existence ; que c’est un crime énorme de les annihiler ou de les réduire dans l’intérêt de la propriété particulière ; et que c’est de l’individualité complètement libre, établie sur l’égalité dans la possession du sol, que doit sortir le vrai caractère national, la vraie, l’invincible puissance nationale.

C’est du choix que la France saura faire, entre les hommes qui veulent la liberté dans l’égalité et les castrats qui veulent la servitude dans le privilège, que dépend son existence. Ce choix, il faudra qu’elle le fasse avant peu. La situation générale de l’Europe, grâce surtout à la position équivoque de la France, est une situation d’attente anxieuse, d’angoisse poignante, qui réclame impérieusement un dénouement. L’air est lourd, étouffant, comme chargé de clameurs qui crient l’immense fatigue des efforts perdus, et les ténèbres commencent à descendre, précédant la tempête. Les cent ans qui viennent de s’écouler ont poussé à des conclusions qui terrorisent ; semblent avoir creusé, au seuil du nouveau siècle, un abîme devant lequel l’humanité s’arrête, prise de vertige. La France donnera-t-elle, encore une fois, le signal des bouleversements ? Ou préfèrera-t-elle mourir, munie des sacrements de l’Église ?

La situation actuelle ne peut durer. La France le sait, le crie, le hurle, et sa voix couvre le fracas des orchestres qui rythment le déhanchement des danses du ventre. Chose curieuse, chacun des deux partis qui se disputent le gouvernement donne inconsciemment une moitié de la solution qui s’impose. Les gens qui sont au pouvoir préconisent des améliorations sociales, et ont raison (bien que leurs paroles n’aient aucune valeur) ; et ils se déclarent partisans d’une législation internationale du travail — que favorise aussi l’Église infâme, et qui ne pourrait être que le plus piteux des leurres ; — en quoi ils agissent le plus sottement du monde. Les nationalistes, de leur côté, prétendent qu’un grand mouvement patriotique est nécessaire, et ont raison (bien que leur façon de concevoir le patriotisme soit l’abjection même) ; et ils ne tiennent