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ILES DE CORAIL.

lement par la croissance de coraux ayant pris pour point d’appui les petits récifs qui se produisent ordinairement dans les lagoons et les parties brisées du récif marginal qui borde tous les attols ayant la forme ordinaire. Je ne peux m’empêcher de faire remarquer une fois de plus la singularité de ces constructions complexes : un grand disque sablonneux et ordinairement concave s’élève abruptement des profondeurs de l’Océan, ses parties centrales sont couvertes çà et là de coraux, ses bords sont revêtus symétriquement de récifs de corail qui atteignent juste la surface de la mer, mais qui, quelquefois, sont couverts d’une magnifique végétation ; chacun d’eux enfin contient un lac d’eau limpide !

Un autre point encore : comme il se trouve que, dans deux archipels voisins, les coraux croissent parfaitement dans l’un et pas dans l’autre, comme tant de conditions que nous avons déjà énumérées doivent affecter leur existence, il deviendrait inexplicable que, au milieu des changements auxquels sont soumis la terre, l’air et l’eau, les Polypes constructeurs de corail continuassent de vivre pendant toute éternité dans un même endroit. Or, comme en vertu de ma théorie les superficies sur lesquelles se trouvent les attols et les récifs barrières s’affaissent continuellement, on devrait de temps en temps trouver des récifs morts et submergés. Dans tous les récifs les sédiments s’écoulent du lagoon ou du canal-lagoon du côté placé sous le venin ce côté est donc moins favorable à la croissance longtemps continuée des coraux ; en conséquence, on trouve assez souvent des parties de récifs morts de ce côté des îles ; ces récifs, bien que conservant encore leur apparence de muraille, se trouvent dans divers cas à plusieurs brasses au-dessous de la surface. Le groupe des Chagos semble, en raison de quelque cause, peut-être par suite d’un affaissement trop rapide, se trouver actuellement bien moins favorablement situé pour la croissance des coraux qu’il ne l’était anciennement. Dans un des attols de ce groupe, une partie du récif marginal ayant 9 milles de longueur est morte et submergée ; dans un second, il n’y a plus que quelques petits points vivants qui s’élèvent jusqu’à la surface ; un troisième et un quatrième sont entièrement morts et submergés ; un cinquième est un amas de ruines dont la conformation a presque disparu. Il est remarquable que, dans tous ces cas, les parties de récif ou les récifs morts se trouvent à la même profondeur à peu près, c’est-à-dire à 6 ou 8 brasses au-dessous de la surface, comme s’ils eussent été entraînés par un mouvement uniforme. Un de ces attols à demi noyés,