Page:Daudet - Jack, I.djvu/153

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brelles claires, des enfants coiffés de chapeaux de paille, des têtes brunes, blondes, en cheveux, ornées de rubans de couleur. Après les éléphants, tout autre d’allure, une girafe venait, le cou raide, portant très haut sa petite tête sérieuse et fière. Des gens étaient montés dessus, et cette singulière caravane défilait dans l’allée tournante, entre la dentelle des jeunes branches, avec des rires, des petits cris, l’excitation que donnent la hauteur, l’air plus vif et aussi une crainte vague corrigée par beaucoup d’amour-propre.

Sous le soleil déjà chaud, ces étoffes de printemps paraissaient riches et soyeuses, et toutes les couleurs ressortaient sur la peau épaisse et rugueuse des éléphants. Enfin on les vit tout entiers, guidés par le cornac, la trompe tendue de droite à gauche vers les pousses d’arbres ou les poches des promeneurs, épais, chargés, tranquilles, agitant à peine leurs longues oreilles, qu’un enfant penché sur leurs dos ou quelque grande fille du peuple en train de rire chatouillaient légèrement d’une pointe d’ombrelle ou d’un fouet inoffensif.

— Qu’as-tu, Mâdou ?… tu trembles… Est-ce que tu es malade ? demanda Jack à son camarade.

Positivement Mâdou défaillait d’émotion ; mais quand il apprit que lui aussi pourrait monter sur les lourdes bêtes, sa figure prit un air grave, posé, presque solennel.

Jack refusa de l’accompagner.