Page:Daudet - L’Immortel (Lemerre 1890).djvu/144

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ments de l’école de Chirurgie où stationnaient quelques coupés de maître à la somptueuse livrée de Messieurs les professeurs. Peu de passants ; des pigeons picorant à même le trottoir qu’elle fit envoler en arrivant devant le magasin, moitié librairie, moitié curiosités, qui étalait juste en face de l’école son enseigne archaïque bien à sa place dans ce recoin du vieux Paris : « Bos, archiviste-paléographe. »

Il y avait de tout, à cette devanture ; anciens manuscrits, livres de raison aux tranches piquées de moisissures, antiques missels dédorés, fermoirs, gardes de livres, puis, collés sur les hautes vitres, des assignats, de vieilles affiches, plans de Paris, complaintes, bons de poste militaires tachés de sang, autographes de tous les temps, une poésie de Mme Lafarge, deux lettres de Chateaubriand à Perluzé bottier ; et des noms de célébrités anciennes et modernes sous des invitations à dîner, quelquefois des demandes d’argent, des aveux de détresse ou des confidences d’amour, à donner la terreur et le dégoût d’écrire. Ces autographes portaient tous leurs chiffres de vente ; et Mme Astier arrêtée un moment à la vitrine pouvait voir, près d’une lettre de Rachel cotée trois cents francs, un billet de Léonard Astier-Réhu à son éditeur Petit-Séquard : deux francs cinquante. Mais ce n’était pas cela qu’elle cherchait derrière