Page:Daudet - Théâtre, Lemerre, 1889.djvu/239

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le père jourdeuil.

Il en a, le lâche ! mais il les coupe. Eh bien ! moi, je les porte aussi longs que je peux, et fièrement, comme un drapeau, le drapeau de Raphaël et du Léonard.

madame jourdeuil.

Ça, c’est vrai, fillette, le Léonard avait de grands cheveux comme ton père, c’est de l’histoire. (Louise va se remettre à la fenêtre.)

le père jourdeuil.

Crinière si l’on veut, ma crinière m’est chère, et si elle meurt avant moi, tant pis ! je porterai perruque, ne fût-ce que pour étonner les bourgeois et pour protester contre l’époque mercantile où nous vivons. Pas vrai, Franqueyrol ? (Ils trinquent.)

franqueyrol.

Le fait est que le vent n’est pas bien bon pour les arts ; depuis quelques années, nous tournons un peu trop à l’Américain, en France.

le père jourdeuil.

Comment, à l’Américain !… mais les Américains sont cent fois plus artistes que nous…

franqueyrol.

Oh ! que non…

le père jourdeuil.

Non ! (Il se lève.) Eh bien, mon cher, l’homme qui vous parle, Henri-Charles-Alexis Jourdeuil, connu dans les arts sous le nom de Jourdeuil-le-Vieux, comme on disait Palma-le-Vieux, Charles-Alexis