Page:Daudet - Théâtre, Lemerre, 1889.djvu/319

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pour toi seul ?… Voyons ! tu as donc des vices, maintenant ? Tu joues ? tu fais courir ?… Quoi ?… des enfants ?… Non !… Alors c’est donc ton père qui est, dans le vrai, et les peintres d’aujourd’hui, vous n’êtes tous que des vitriers…

henri, d’un air prud’homme.

Hé ! mon cher, c’est bien dur aussi d’être exposé toute sa vie aux privations et aux déboires de la bohème artistique… Et, ma foi ! quand on trouve une jolie situation, bien assise, bien régulière…

franqueyrol.

Non !… non !… c’est impossible… ce n’est pas de lui, ces phrases-là ; Clémence a raison, ce n’est pas de lui.

henri, très ému.

Clémence !… tu l’as vue ?… (Plus bas.) Que fait-elle ? Que t’a-t-elle dit ?

franqueyrol, lui prenant la main avec énergie.

Elle m’a dit que tu mentais, que tu lui avais écrit une lettre trop cruelle et trop lâche pour être vraie, et que, quoi qu’il arrive, tes amis devaient t’aimer quand même et te rester fidèles malgré toi, parce qu’il y aurait toujours quelque chose de grand et d’héroïque au fond de tout ce que tu ferais… Voilà ce qu’elle m’a dit, la pauvre ! Voilà ce qu’elle m’a dit avec ses beaux yeux tout reluisants de larmes. (Henri se détourne très ému.) Et maintenant… maintenant je suis sûr qu’elle ne s’est pas trompée.

henri.

Eh bien ! oui, c’est vrai… J’aime cette femme