Page:De Banville - Les Stalactites.djvu/177

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Vos lèvres déjà tout en fleur
Ont l’harmonieuse pâleur
De la sensitive froissée,
Et ce lys que rien n’outragea,
Votre front se courbe déjà
Sous l’orage de la pensée.

Vos regards sont si languissants
Qu’à votre petit cœur je sens
Saigner de secrètes blessures,
Et parfois dans vos yeux pensifs
Je crois voir s’amasser, captifs,
Tous les pleurs des amours futures.

Ah ! que ces pleurs silencieux
Ne coulent jamais de vos yeux !
Et ne voyez jamais éclore,
Autour de vos cheveux flottants,
De nos saisons que le printemps
Et de notre jour que l’aurore !

Que rien n’emplisse de sanglots
Votre âme pareille à ces flots
Où Dieu lui-même se reflète !
Parlez aux cieux, aux champs, aux bois,
Avec votre plus douce voix,
Soyez heureuse, chère Odette !