Page:De Bougainville - Voyage autour du monde, 1771.djvu/145

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ronds attachés aux deux bouts d’un boyau cordonné, semblables à ceux dont on se sert dans toute cette partie de l’Amérique et que nous avons décrits plus haut. Ils avaient aussi des petits couteaux de fer dont la lame était épaisse d’un pouce et demi à deux pouces. Ces couteaux de fabrique anglaise leur avaient vraisemblablement été donnés par M. Byron. Leurs chevaux, petits et fort maigres, étaient sellés et bridés à la manière des habitants de la rivière de la Plata. Un Patagon avait à sa selle des clous dorés, des étriers de bois recouverts d’une lame de cuivre, une bride en cuir tressé, enfin tout un harnais espagnol. Leur nourriture principale paraît être la moelle et la chair de guanaques et de vigognes. Plusieurs en avaient des quartiers attachés sur leurs chevaux, et nous leur en avons vu manger des morceaux crus. Ils avaient aussi avec eux des chiens petits et vilains, lesquels, ainsi que leurs chevaux, boivent de l’eau de mer, l’eau douce étant fort rare sur cette côte et même sur le terrain. Aucun d’eux ne paraissait avoir de supériorité sur les autres ; ils ne témoignaient même aucune espèce de déférence pour deux ou trois vieillards qui étaient dans cette bande. Il est très remarquable que plusieurs nous ont dit les mots espagnols suivants : manana, muchacho, bueno, chico, capitan. Je crois que cette nation mène la même vie que les Tartares. Errant dans les plaines immenses de l’Amérique méridionale, sans cesse à cheval, hommes, femmes et enfants, suivant le gibier ou les bestiaux dont ces plaines sont couvertes, se vêtant et se cabanant avec des peaux, ils ont encore vraisemblablement avec les Tartares cette ressemblance qu’ils vont piller les caravanes des