Page:De Bougainville - Voyage autour du monde, 1771.djvu/328

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

plus loin dans le sud-ouest que nous ne l’avions pu juger alors.

Nous cherchions comme je viens de le dire, à la doubler dans le sud ; mais à l’entrée de la nuit, nous y étions encore engagés, sans savoir précisément jusqu’où elle s’étendait. Le temps, incessamment chargé de grains, ne nous avait jamais montré dans un même instant tout ce que nous devions craindre ; pour surcroît d’embarras, le calme vint aussitôt que la nuit et ne finit presque qu’avec elle. Nous la passâmes dans la continuelle appréhension d’être jetés sur la côte par les courants. Je fis mettre deux ancres au mouillage et allonger leurs bittures sur le pont ; précaution presque inutile : car on sonda plusieurs fois sans trouver le fond. Tel est un des plus grands dangers de ces terres : presque à deux longueurs de navire des récifs qui les bordent, on n’a point la ressource de mouiller.

Heureusement le temps se maintint sans orages ; même vers minuit, il se leva une fraîcheur du nord qui nous servit à nous élever un peu dans le sud-est. Le vent fraîchit à mesure que le soleil montait et il nous retira de ces îles basses, que je crois inhabitées ; au moins, pendant le temps qu’on s’est trouvé à portée de les voir, on n’y a distingué ni feux, ni cabanes, ni pirogues. L’Étoile avait été dans cette nuit plus en danger encore que nous ; car elle fut très longtemps sans gouverner, et la marée l’entraînait visiblement à la côte, lorsque le vent vint à son aide. À deux heures après midi, nous doublâmes l’îlot le plus occidental et nous gouvernâmes à ouest sud-ouest.

Le 11 à midi, étant par deux degrés dix-sept minutes de latitude australe, nous aperçûmes, dans le sud, une côte élevée qui nous