Page:De Musset - Voyage en Italie et en Sicile, 1866.djvu/227

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course avec une nouvelle ardeur. Par la route de Castellamare arrivent les bandes de Capri, d’Amalfi et de Sorrente qu’on reconnaît à la haute taille et à la beauté des jeunes filles. Par Chiaia, on voit passer les femmes de Procida qui portent des robes ouvertes et des souliers garnis de clinquant ; celles d’Ischia, coiffées d’un turban oriental. Les populations de Baïa et de Pouzzoles se mêlent en bataillons nombreux ; celles de Capoue et d’Averse débouchent par la porte Capuane. Bientôt la petite route de la madone dell’Arco, ordinairement si fraîche et si paisible, est ensevelie sous un tourbillon de poussière et encombrée de voitures qui s’accrochent et versent le mieux du monde dans les fossés. Mais enfin on arrive et il y a place pour tous à l’entour de l’église.

La journée se partage entre deux occupations distinctes, la dévotion et le plaisir. Avent de s’amuser, on commence par écouter la messe. On s’unit par la prière à ceux qui viennent remercier ou implorer la sainte Vierge et, dans cette foule animée, se heurtent les sentiments les plus opposés. Tandis que les gens favorisés adressent leurs actions de grâce et déposent leurs offrandes, d’autres, moins heureux, postulent et supplient avec des sanglots ; d’autres encore exhalent leurs plaintes avec une amertume déchirante. La Madone n’exauce pas tous les souhaits ; elle est sourde ou impuissante pour quelques-uns. La volonté de Dieu passe avant la sienne ; elle ne peut que protéger et recommander ceux qu’elle aime. Les malheureux pour qui ses prières n’ont rien obtenu finissent par s’en prendre à elle de son peu de crédit et lui reprochent sa dureté en termes hardis. La Madone