Page:De Musset - Voyage en Italie et en Sicile, 1866.djvu/234

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Mon entrée à Naples, au mois de février, au milieu d’un cortège de gamins exaltés, avait mérité le beau nom de marche triomphale. Quelle différence à la sortie ! Figurez-vous un vieux coche encombré de bagages ; sur le devant on lui avait bâti un demi-cabriolet, semblable par sa forme étique à ces petits chapeaux castors dont se coiffent les héroïnes des romans anglais. Sur quatre roues qu’il possédait, une arquée, une autre cagneuse. Et l’attelage, bon Dieu ! Trois grands fantômes de chevaux qui paraissaient morts depuis longtemps : deux au timon et le troisième en arbalète, à dix pas en avant des autres, attaché par de longues cordes qui n’étaient jamais tendues. C’est dans cette machine du temps de Charles-Quint que je montai, le cœur navré, tournant le couteau contre moi-même pour rompre tous les petits liens qui me retenaient dans ce Naples si charmant et si regrettable. J’aurais voulu que le coche fût plus horrible encore. Nous étions au 8 juin. La baie, le Vésuve et Capri ne m’avaient jamais semblé si azurés et je sortais, comme un fugitif, par la porte