Page:De Musset - Voyage en Italie et en Sicile, 1866.djvu/291

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paralysie. A Florence, comme partout, on trouve d’autres beautés apprivoisées aux rencontres ; aussi mon ami V…, emporté par ses vingt-deux ans et sa curiosité mathématique, avait beaucoup d’occupation. De messagers officieux le suivaient à la piste, comme font les petits poissons remorqués par les saumons ; sans me coucher de bonne heure, j’étais réveillé, la nuit, par le retour de mon compagnon, après quelque belle aventure dont il me fallait, à l’instant-même, écouter le récit d’une oreille à moitié endormie.

Le progrès aura de la peine, Dieu merci, à effacer la physionomie originale de Florence. Le gaz hydrogène est inconnu et, quant à l’éclairage à l’huile, on ne sait pas ce que c’est. Celui de la lune est le seul qu’on emploie. Pendant la nuit, la ville demeure plongée dans une obscurité profonde ; mais on y chante, sans interruption, jusqu’à l’aurore. Sur la place de Sainte-Marie Nouvelle, où nous demeurions, il y avait des sérénades perpétuelles, des chœurs accompagnés de guitares, de violons et de cors.

Au coucher du soleil, la bonne compagnie se rend en voitures à la promenade Cascine. En arrivant au rond-point, on met pied à terre et on cause. C’est là qu’on rend ses visites et qu’on remplit, d’une manière commode, ses devoirs du monde. Florence est une ville de plaisir ; on y danse en toutes saisons. J’ai assisté à plusieurs bals magnifiques donnés dans les jardins. Par une horrible injustice, la bienveillance hospitalière de la société toscane a tourné contre elle et lui a fait une réputation de légèreté qu’elle ne mérite