Page:De Musset - Voyage en Italie et en Sicile, 1866.djvu/307

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les tasses de porcelaine, les jouets d’enfants et les fleurs artificielles, Matteo aurait bien voulu lui offrir un cadeau ; mais en fouillant toutes ses poches, il n’y trouva pas un denier, en sorte qu’il fut obligé de mettre un frein à sa générosité. Andronic brûlait d’envie de présenter à sa belle une boîte en carton qu’elle avait paru souhaiter ; mais il eût beau retourner sa bourse dans tous les sens, il n’y découvrit pas un baïoc, c’est pourquoi il renonça, par nécessité, à faire le magnifique.

Nos deux amoureux continuèrent ainsi, pendant un mois, à suivre partout leur maîtresse et à se présenter chez elle, avec la discrétion nécessaire pour ne point donner d’ombrage au curé qui était la simplicité-même. Ils avançaient tous deux insensiblement dans les bonnes grâces de la belle Fioralise, l’un d’eux n’obtenant pas une faveur sans que l’autre reçût un équivalent, si bien qu’un licencié ès sciences n’aurait pas su dire lequel des deux avait la préférence. Cependant les voisines jasaient, entre elles, de l’imprudence du curé. Une dévote vint avertir le bonhomme des propos qui se tenaient sur sa nièce et, un matin, les deux amoureux trouvèrent la porte fermée et la servante inflexible comme in cerbère. Sans s’en douter, le vieil oncle employait le plus sûr moyen d’exaspérer la passion des deux jeunes gens ; car cos seigneuries n’ignorent pas que l’amour ressemble à ces torrents dont ni les écluses, ni les murailles, ne peuvent arrêter le cours. Andronic et Matteo ne songèrent plus qu’à faire ouvrir cette porte close et le même expédient leur vint à l’esprit à tous les deux en même temps. Le dimanche suivant, Matteo entra dans la sacristie au moment où le curé mettait