Page:De Musset - Voyage en Italie et en Sicile, 1866.djvu/348

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d’anecdotes, de nouvelles diverses et d’annonces payantes, où un simple filet sépare la discussion des intérêts les plus graves, d’un morceau de poésie ou d’un caprice d’imagination. « Enfin, me disais-je, je vais donc lire quelque chose de très spirituel, écrit sans contrainte et sans préoccupation ». Je tombai sur cette phrase que je transcris littéralement : « La partition sublime de Robert Simnel reçoit, tous les jours, plus d’extension ». C’était mal débuter, après un an d’absence ; mais la réclame de théâtre est dispensée de savoir sa langue. Le feuilleton m’offrait une revanche ; je le saisis et m’enfonçai, jusqu’à la dernière colonne, dans un galimatias double, dans un abus de mots si étrange et si fou que ma soif en fut, du coup, étanchée pour quinze jours.

En terminant le récit d’un voyage en Italie, la politesse demanderait que mon dernier mot fût une flatterie ; malheureusement, je ne trouve, au bout de ma plume, dans ce moment, qu’un petit reproche à adresser aux Italiens. Les brillantes qualités de leur esprit et de leur caractère sont gâtées par un défaut qui est leur susceptibilité extrême, indigne d’un peuple parfaitement civilisé. Leur amour-propre est si chatouilleux que cent éloges ne sont rien pour eux auprès de la plus légère critique. Pour leur plaire, il ne faudrait jamais sortir d’un enthousiasme aveugle, même en matière de cuisine. Les touristes français les ont, Dieu merci, assez régalés de pathos admiratif. Etant persuadé d’avance que ceux d’entre eux qui parcourront ces pages, ne me tiendront pas compte de tous mes compliments et ne verront que cette dernière attaque, je veux, du moins, les placer sous le tranchant d’un dilemme : « Ou tu n’oseras te fâcher