Page:De Musset - Voyage en Italie et en Sicile, 1866.djvu/98

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ensemble, on nous mariera sur l’heure et nous emmènerons nos épouses. J’ai acheté un beau mouchoir de toile blanche que je jetterai à celle qui aura l’avantage de me plaire. Si votre excellence daigne me faire un petit regalio, ce sera autant de gagné pour mes frais de noces.

Vers huit heures du soir, dans le salon de la marquise de S…., je causais, avec un Français, de la cérémonie intéressante qui devait avoir lieu, le lendemain, à l’Annonciade.

— Il y a ici, me dit-il, une dame napolitaine qui pourrait vous raconter l’histoire d’un enfant trouvé et d’un mariage de ce genre. J’en ai appris quelques détails à bâtons rompus. Faites votre cour à cette dame et obtenez d’elle un récit complet.

Il se trouva précisément que je connaissais cette personne. Je lui adressai ma prière et lui demandai dans quel moment elle pourrait satisfaire ma curiosité.

— A l’instant même, si vous le voulez, me répondit-elle.

Nous allâmes nous asseoir dans le boudoir chinois de la marquise et la dame commença en ces termes l’histoire de l’enfant de l’Annonciade :

Quand vous visiterez l’hospice des Trovatelli, ne manquez pas d’examiner la buca, que vous appelez en France le tour. C’est une espèce de berceau suspendu au-dessous d’une ouverture ronde, dont le diamètre a été calculé sur la grosseur moyenne des enfants de six mois. Le règlement ordonne qu’on accepte tous ceux qui peuvent passer dans cette buca, quel que soit leur âge. Autrefois on y introduisait souvent des enfants de trois ou quatre ans ; cet abus