Page:De Scudery - Alaric, ou Rome vaincue, 1654.djvu/137

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qui me mene à la gloire :
Pour haster mon retour souhaittez ma victoire :
Et puis qu’il faut que j’aille en ces lieux escartez,
Faites que j’obeïsse, et dittes moy, partez.
Partez, respond alors cette belle irritée ;
Partez, allez trouver la peine meritée ;
L’orage ; les rochers ; et les flots irritez ;
Les vents ; les bancs de sable ; encore un coup, partez.
O trop inexorable, et cruelle personne,
Respond il, c’est assez que je vous abandonne :
C’est assez, c’est assez, que je quitte vos yeux,
Sans me les faire voir cruels et furieux.
L’orage, les rochers, et les flots en colere,
Quand la vostre paroist ne m’espouventent guere :
Et ce nuage obscur que vos yeux me font voir,
Est le seul que je crains jusques au desespoir.
Les vents, les bancs de sable, aux bords de Ligurie,
Me verront un escueil qui vaincra leur furie :
Mais contre la fureur que monstre un œil si beau,
Il le faut confesser, je ne suis qu’un roseau.
Partir est un grand mal ; vous quitter est la genne ;
Mais vous quitter faschée, et peut-estre avec haine ;
Mais vous quitter, helas ! Quand cét œil le deffend,
C’est de tous les malheurs, le malheur le plus grand.
O de tous les tyrans, tyran le plus severe,
Dit-elle, il fait mourir ce qu’il dit qu’il revere ;
Il flatte ; il assassine ; il soupire ; il meurtrit ;
Et son cœur ne sent rien de tout ce qu’il nous dit.
Vous craignez