Page:De Scudery - Alaric, ou Rome vaincue, 1654.djvu/156

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Au haut de l’escalier se voit un vestibule,
Tel qu’en eut autrefois la ville de Romule :
Eslevé ; spacieux ; riche ; clair ; bien percé ;
Et dont la voûte semble un vase renversé.
Là de tous les costez, brille avec avantage,
Par pieces de raport un arabesque ouvrage :
Où l’or et le cristal, meslez confusément,
Forment avec l’azur un beau compartiment.
De là dans un salon, ce grand heros arrive,
Où les yeux sont trompez par une perspective :
Car dans un feint jardin, de longs rangs de cypres,
Font que l’on croit fort loin, ce qu’on voit de fort pres.
L’architecture encore y paroist fort trompeuse :
Elle est bien imitée ; elle est majestueuse ;
L’ordre en est regulier comme les ornemens,
Et rien n’est plus trompeur que ses renfondremens.
Le heros immortel voit alors une chambre,
D’où s’exhale un parfum meslé de musc et d’ambre :
Qui remplissant les sens d’un plaisir infiny,
Monte jusqu’au lambris de laque et d’or bruny.
Ce bel apartement, a ses meubles fort riches :
Six tableaux excellens posent sur des corniches :
Leurs quadres d’or massif esbloüissent les yeux,
Et jamais le cyseau ne fera rien de mieux.
C’est dans un si beau lieu, que plus d’une peinture,
A la gloire de l’art, fait honte à la nature :
Et les pinceaux d’Apelle, en merveilles feconds,
Eussent deû rendre hommage au pinceau des demons.