Page:De Scudery - Alaric, ou Rome vaincue, 1654.djvu/155

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

regne par tout l’ouvrage :
L’on voit ramper par tout, l’acanthe au beau feüillage :
Et par tout on peut voir entre ces ornemens,
Des chapeaux de triomphe, et des vases fumans.
Ce ne sont que festons ; ce ne sont que couronnes ;
Bases et chapiteaux ; pilastres et colomnes ;
Masques ; petits amours ; chifres entre-lacez ;
Et cranes de beliers, à des cordons passez.
Les yeux trouvent par tout, moulures et corniches ;
Et figures de bronze en de superbes niches ;
Phrises ; balcons hors d’œuvre ; et cartouches encor ;
Et cornes d’abondance, à fruit, feüille, et fleur d’or.
Enfin tout ce que peut la noble architecture ;
Le bel art du dessein ; la sçavante sculpture ;
Tout est avec esclat au front de ce palais,
Qui n’a point de semblable, et n’en aura jamais.
Alaric estonné de sa magnificence,
La regarde, l’admire, et puis apres s’avance ;
Traverse un grand portique, et monte l’escalier,
Qui luy paroist superbe autant que singulier.
D’un marbre blanc et pur, cent nimphes bien rangées,
De grands paniers de fleurs sur leur teste chargées,
Où l’art et la nature ont mis leurs ornemens,
Semblent vouloir monter aux beaux apartemens.
Leur main gauche soustient ces paniers magnifiques ;
Leur droite tient les plis de leurs robes antiques ;
Et l’art a fait changer par ses nobles efforts,
Les veines de ce marbre, aux veines de leur corps.