Page:De Scudery - Alaric, ou Rome vaincue, 1654.djvu/201

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Ce que la servitude a de plus affligeant ;
Ce que la tyrannie a de plus outrageant ;
La fierté, le mespris, la rigueur, le caprice ;
A toute heure, en tout temps, augmentoient son suplice :
Quand un mal finissoit, l’autre venoit s’offrir :
Enfin lassé de vivre autant que de souffrir,
Et pour trouver le bout d’une si longue peine,
Il s’écrasa la teste avec sa propre chaisne :
Et mourut en disant qu’il avoit merité,
Plus que n’avoit souffert son infidellité.
O prince genereux, conservez la memoire,
De cette redoutable et pitoyable histoire :
Et n’oubliez jamais que le ciel en courroux,
Sçait punir un parjure avec d’horribles coups.
Ha, respond Alaric, cét amant infidelle,
Meritoit une mort plus longue et plus cruelle :
Le destin luy fit grace, et son crime odieux,
Trouva trop de pitié parmy l’ire des cieux.
Oüy, le sort le punit par un trop court suplice :
La clemence pour luy surmonta la justice :
Et le ciel plus severe, en le faisant punir,
En devoit un exemple aux siecles à venir.
Quel crime est comparable à son ingratitude ?
L’enfer peut-il avoir un tourment assez rude ?
Non, parmy les douleurs eternelles des morts,
Sans doute il n’en est point, si ce n’est son remords.
Ce vautour immortel qui déchire son ame,
Augmente sa douleur au milieu de la flâme :