Page:De Scudery - Alaric, ou Rome vaincue, 1654.djvu/267

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Vous dont le noble orgueil, d’un vol ambitieux,
Osa bien s’eslever jusqu’au thrône des cieux :
Malgré la triste fin d’une si belle guerre,
Relevez vos esprits au centre de la terre :
Et si ce thrône enfin ne se peut renverser,
Pour amoindrir sa gloire il la faut traverser.
R’allumons tout le feu de nostre antique haine :
Joignons-y le despit d’une entreprise vaine :
Et par mille complots, adroits comme inhumains,
Deffendons les Romains pour perdre les Romains.
Anges, je l’ay connu, nostre vainqueur injuste,
Veut relever l’éclat de la ville d’Auguste :
Il veut la corriger, non la perdre en ce jour ;
Et sa colere mesme a fait voir son amour.
Il sçait (car que ne sçait sa science profonde ? )
Que nous sommes les roys de la reyne du monde :
Et que par les plaisirs l’attachant à nos chars,
Nous avons triomphé comme ont fait les Cezars.
Il sçait que le malheur peut réveiller une ame ;
Luy monstrer son devoir, et la sauver de blâme ;
Et c’est pour porter Rome à faire un tel effort,
Qu’il va prendre Alaric dans les glaces du Nord.
Il veut perdre et sauver cette superbe ville :
Tout ce que nous tentons nous demeure inutile :
Les spectres et les ours ne nous servent de rien :
La flâme en s’esteignant s’oppose à nostre bien :
Le tumulte s’appaise, et la fureur publique :
En vain nous bastissons un palais magnifique :