Page:De Scudery - Alaric, ou Rome vaincue, 1654.djvu/309

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Ne trouvant plus de fleurs, et manquant d’aliment,
Couvrir tous les buissons, et voler foiblement.
Ainsi voit-on alors avec leurs habits sombres,
Les troupes d’Alaric couvrir tout de leurs ombres :
Et d’un pas triste et lent, qui marque leur douleur,
Traisner de ce grand deüil la funeste couleur.
Mais pendant que le peuple attentif les contemple,
Le mort et les vivants arrivent dans le temple :
Où le grand sacrifice à l’instant commencé,
Voit au pied des autels le roy mesme abaissé.
Mille et mille flambeaux à l’entour de la biere,
Font briller tristement leur lugubre lumiere :
Et mille et mille voix, avec de saints transports,
Demandent le seul bien qui peut manquer aux morts.
Alors un orateur, entre les Goths celebre,
Du brave Athalaric fait l’oraison funebre :
Et voulant consacrer le nom de ce heros,
Impose à tous silence, et leur tient ces propos.
Car bien que de cét art il n’ait aucun modelle,
La plus vive eloquence orient la plus naturelle :
Et les premiers sçavans ont dans leur propre fonds,
Trouvé d’un si bel art les principes feconds.
Si je parlois, dit-il, ô monarque invincible,
D’une vertu commune, et qui fust moins visible,
Je tâcherois icy de flatter mon objet,
Et de faire un discours plus grand que son sujet.
Mais je n’ay pas besoin de ce foible artifice :
La seule verité fera mieux son office :