Page:De Scudery - Alaric, ou Rome vaincue, 1654.djvu/344

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Son noble orgueil luy plaist ; et ce jeune guerrier,
S’avance, la saluë, et parle le premier.
Si mes yeux disent vray, genereuse amazone,
(Dit-il en l’abordant) vous descendez du thrône :
Et l’on voit en voyant vos rares qualitez,
Si vous n’en venez pas, que vous le meritez.
Seigneur (respond alors cette belle personne)
Ceux dont je tiens le jour, ont porté la couronne :
Et mes cruels destins, dont je sens la rigueur,
M’ont arraché leur sceptre, et m’ont laissé leur cœur.
Mais si quelque pitié, me voyant malheureuse,
Peut esmouvoir pour moy vostre ame genereuse ;
Peut vous donner pour moy ce noble sentiment ;
Faites que l’empereur m’escoute seulement.
O beauté trop aymable, et desja trop aymée,
Le voicy, luy dit-il, qui vient voir son armée :
Vous en obtiendrez tout, beau chef-d’oeuvre des cieux,
Car je veux vous servir, et ce prince a des yeux.
A ces mots le guerrier plein d’ardeur et de zele,
Luy presente la main, et s’avance avec elle ;
Aborde l’empereur, la regardant tousjours ;
La fait voir à ce prince, et luy tient ce discours.
La victoire est à vous, monarque grand et rare,
Puis qu’en vostre faveur Minerve se declare :
Car qui peut soustenir les efforts de nos bras,
Combatant pour Arcade avec cette Pallas ?
Grand prince (luy dit-elle avec beaucoup de grace)
Des froids climats du Nord jusqu’à celuy de Thrace,