Page:De Scudery - Alaric, ou Rome vaincue, 1654.djvu/393

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Luy portez-vous la mort ? Luy portez-vous ses fers ?
Vous souviendrez-vous là des outrages souffers ?
Serez-vous sans pitié ? Serez-vous sans colere ?
Celuy qui vous a plû, vous pourra-t-il desplaire ?
Cherchez-vous à le voir, pour ne le voir jamais ?
Ou faites-vous la guerre, afin d’avoir la paix ?
Ma main vous respondra (luy dit Amalasonthe,
Le teint vif et vermeil de despit et de honte)
La chose est resoluë, en vain nous disputons :
C’est pourquoy sans tarder, partons, seigneur, partons.
Partons, dit-il encor, puis qu’on nous le commande :
Faisons plus qu’on ne veut, et plus qu’on ne demande :
Et faisons bien-tost voir, par nos fameux exploits,
Que les rois sont vaincus, et mortels comme rois.
Là, ce Grec s’abandonne à sa haine allumée,
Et dés le point du jour, fait descamper l’armée :
Tourne teste vers Rome, et marche promptement,
Plein d’amour, plein de rage, et de ressentiment.
L’amazone du Nord, qui cherche un infidelle,
Paroist au premier rang, aussi fiere que belle :
Et son amant jaloux, qui l’aime et qui la voit,
Soupire en la voyant, et craind tout ce qu’il croit.
A peine par deux fois l’astre de la lumiere,
Eut illuminé l’air de sa clarté premiere,
Et troublé de la nuit le paisible repos,
Lors qu’on vit en presence, et les Grecs, et les Goths.
Eutrope, de son camp la haute intelligence,
Met l’armée en bataille, aveques diligence :
Passe de troupe en troupe, et