Page:De Scudery - Alaric, ou Rome vaincue, 1654.djvu/86

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Qui dans toute saison a le sommet neigeux,
Et le pied tout couvert de flâmes et de feux.
De par tout sort le feu meslé dans la fumée :
Des pierres qu’il eslance est la terre semée :
Un tonnerre eternel y bruit horriblement,
Et se mesle en ce lieu, si l’histoire ne ment,
Aux pleintes des damnez qu’on entend dans ce gouffre,
Qui petille par tout de bithume et de souffre,
Confondant en tout temps, en cent et cent façons,
Le froid avec le chaud, la braise et les glaçons.
Dans les flancs caverneux de la triste montagne,
Qu’envelope la nuit ; que l’horreur accompagne ;
Une large spelonque, horrible en son aspect,
Donne de la terreur, en un lieu si suspect.
Sur le dome eslevé, dont la grote s’enfonce,
Pend, comme à gros festons, la seche pierre ponce :
Et le souffre jaunastre y mesle sa couleur,
Petrifié qu’il est, et privé de chaleur.
Cent congelations sortent de cette voûte,
Au milieu du cristal, dont elle est presques toute :
Car l’eau qui du rocher va par tout degoutant,
Par le froid excessif, se fixe en un instant :
Et le combat du feu, contre l’aspre froidure,
Transforme l’eau qui tombe, et la rend ainsi dure :
Tant ces vieux ennemis, qui sont si mal d’accord,
S’opposent l’un à l’autre au froid climast du Nord.
Dans les creux recullez de l’antre espouvantable,
Le nocturne hibou de son cry lamentable,