Page:De Scudery - Eudoxe, tragi-comédie, 1641.djvu/106

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Que le feu qui dévore en bouleversant tout,

Pour nous favoriser, vient de laisser debout :

Car parmi ce débris, dont l'horreur épouvante,

On ne peut être vu de personne vivante,

Parlez donc cher Ursace, et me dites pourquoi, [1730]

Vous avez souhaité vous voir seul avec moi.

Ursace

Madame, sur le point de rompre mon silence,

Je sens d'un mal secret, l'extréme violence,

Ma constance me quitte, et puis elle revient ;

Votre intérêt m'anime, et le mien me retient ; [1735]

Je veux, je ne veux plus, et l'âme balancée,

Tâche inutilement, d'exprimer sa pensée.

L'amour lui rend la force, et puis la lui ravit ;

Par l'amour elle meurt, par l'amour elle vit ;

Il la force à parler, il la force à se taire ; [1740]

Et l'un et l'autre enfin ne m'est plus volontaire.

Mais dans l'état douteux, où je suis en ce jour,

Il faut, il faut se vaincre, en faveur de l'amour :

Car si l'excès du mal, me fait perdre la vie,

La douleur ne fera, que suivre mon envie ; [1745]

Je sais que le trépas me pourra secourir,

Il faut donc se résoudre, et parler pour mourir.

Assez votre grand coeur, généreux, et fidèle,

A témoigné pour moi, son amour, et son zèle,

Et le mien serait lâche, et sans ressentiment, [1750]

S'il n'était satisfait, d'être aimé constamment.