Scène II
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Ainsi quoi qu'il arrive, [655]
Si le corps est captif, l'âme n'est point captive ;
Sa liberté natale est un riche trésor,
Que même dans les fers, elle conserve encor ;
Et que tous les tyrans, avec leur insolence,
N'ont jamais pu soumettre à tant de violence. [660]
Ils peuvent renverser des empires entiers ;
En arracher le sceptre aux justes héritiers ;
Sur la tête des rois, par un orgueil extrême,
Marcher en s'élevant jusqu'à leur trône même :
Mais encor que leur vice en paraisse vainqueur, [665]
Ils ne sauraient forcer la liberté du cœur.
Cette place est trop forte, et de trop d'importance ;
On ne la prend jamais que par intelligence ;
Contre elle aucun effort n'a jamais réussi,
Et quand elle est surprise, elle veut l'être aussi. [670]
En vain de Genséric, la force, et la fortune,
Tâchent de soutenir l'amour qui m'importune ;