Seigneur avec raison ce discours me surprend :
Je ne l'attendais pas d'un monarque si grand :
Je sais qu'il est certain que vous m'avez servie,
Et je m'en souviendrai le reste de ma vie : [740]
Mais tenant ce service, et si grand et si cher,
Il n'était pas besoin de me le reprocher.
Et moins encor seigneur était-il raisonnable,
De me faire un discours qui n'est pas pardonnable,
Qui vous offense plus, qu'il ne peut m'offenser, [745]
Puisqu'un prince bien né, n'y peut jamais penser.
Je ne le puis souffrir, ni m'imposer silence ;
Non, je ne puis souffrir ce mot de violence ;
Il choque mon honneur, il fait tort à mon sang,
Et ne se doit point dire, à celles de mon rang. [750]
Oubliez-vous seigneur, que cette infortunée
Deux fois impératrice, et deux fois couronnée,
A tenu si longtemps le sceptre dans sa main,
Compagne d'un César, d'un empereur romain,
Et que je suis enfin pour ne dire autre chose, [755]
Fille d'Athenais, fille de Théodose ?
Et qu'on a vu souvent, mon père, et mon époux,
Paraître sur le trône, et des rois à genoux.
Ha seigneur, parlez mieux, et rentrez en vous-même ;
Les princes peuvent perdre, et sceptre et diadème [760]