Page:De Scudery - Eudoxe, tragi-comédie, 1641.djvu/47

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Que faut-il être, un dieu, pour pouvoir mériter ?

D'aimer sans vous déplaire, et sans vous irriter ?

Non, ce n'est point l'objet que ce coeur se propose : [815]

Et son orgueil n'a pas une si noble cause ;

Son sentiment est bas, honteux, servile, abject ;

Et méprisant les rois, il adore un sujet :

Le souvenir d'Ursace, occupe sa pensée ;

C'est ce fantôme heureux, qui vous rend insensée ; [820]

C'est lui qui me détruit, qui me fait rebuter,

Et qui sort du tombeau, pour me persécuter.

Ennemi de mon bien, obstacle de ma joie,

Fantôme, prend un corps, afin que je te voie,

Ne sois plus invisible, en me persécutant, [825]

Viens ici, montre-toi, ta maîtresse t'attend.

L'impératrice

Ni mon coeur n'est point bas, ni ma vertu douteuse,

On doit cacher sa flamme, alors qu'elle est honteuse :

Mais lorsqu'on est brûlé d'un feu si pur, si beau,

D'un feu qui se conserve, au milieu du tombeau ; [830]

L'âme la plus parfaite, et la plus estimée,

Peut dire hautement, qu'elle en est enflammée.

Je ne le cele point, j'aime son souvenir :

La mémoire d'Ursace en moi ne peut finir ;

Il eut tant de vertus, il les posséda telles, [835]

Qu'il est juste après lui de les rendre immortelles ;

J'en veux toujours parler, c'est l'unique moyen ;