Page:De Scudery - Eudoxe, tragi-comédie, 1641.djvu/59

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Et que les bords de Calpe, et ceux d'Abile aussi,

Sachent que leur vainqueur, se déshonnore ici ?

Faut-il qu'on vous reproche, ayant vaincu l'Afrique, [1015]

Que la foi d'un vandale, est une foi punique ?

Car en cette action, seigneur, vous témoignez,

Que vous prenez l'humeur, des lieux où vous regnez.

Une reine en ses maux, vous appelle à son aide ;

Vous lui donnez la mort, en suite du remède ; [1020]

Vous ne la délivrez, que pour la captiver ;

Enfin vous la perdez au lieu de la sauver :

Vous la perseécutez d'une amour qui la fâche ;

Et tout cela seigneur, par le conseil d'un lâche.

Mais si ce grand esprit, que vous tenez des cieux, [1025]

En cette occasion voulait ouvrir les yeux,

Et considérer bien ce qu'il veut entreprendre,

Bien loin de l'attaquer, il voudrait la défendre,

Et pour la satisfaire, après un si grand tort,

Condamnerait lui-même un perfide à la mort. [1030]

C'est à quoi la raison, par ma voix vous exhorte,

Et si cette raison n'est encore assez forte,

C'est à quoi votre honneur, vous oblige aujourd'hui ;

Ne faites rien pour moi, mais faites tout pour lui ;

Sauvez l'impératrice, en sauvant votre gloire ; [1035]

Emportez sur vous-même, une illustre victoire ;

Et s'il faut apaiser votre esprit irrité,

Ma tête répondra de ma témérité.