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CORINNE OU L’ITALIE

nui du comte d’Erfeuil décourageait Oswald ; il avait d’ailleurs des préventions contre les Italiens et contre l’Italie ; il ne pénétrait pas encore le mystère de cette nation ni de ce pays, mystère qu’il faut comprendre par l’imagination plutôt que par cet esprit de jugement qui est particulièrement développé dans l’éducation anglaise.

Les Italiens sont bien plus remarquables par ce qu’ils ont été, et par ce qu’ils pourraient être, que par ce qu’ils sont maintenant. Les déserts qui environnent la ville de Rome, cette terre fatiguée de gloire qui semble dédaigner de produire, n’est qu’une contrée inculte et négligée, pour qui la considère seulement sous les rapports de l’utilité. Oswald, accoutumé dès son enfance à l’amour de l’ordre et de la prospérité publique, reçut d’abord des impressions défavorables en traversant les plaines abandonnées qui annoncent l’approche de la ville autrefois reine du monde : il blâma l’indolence des habitans et de leurs chefs. Lord Nelvil jugeait l’Italie en administrateur éclairé, le comte d’Erfeuil en homme du monde ; ainsi, l’un par raison, et l’autre par légèreté, n’éprouvaient point l’effet que la campagne de Rome produit sur l’imagination, quand on s’est pénétré des souvenirs