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CORINNE OU L’ITALIE.

une rêveuse indolence dont on se rend à peine compte en l’éprouvant.

Pendant la nuit, des mouches luisantes se montraient dans les airs ; on eût dit que la montagne étincelait, et que la terre brûlante laissait échapper quelques-unes de ses flammes. Ces mouches volaient à travers les arbres, se reposaient quelquefois sur les feuilles, et le vent balançait ces petites étoiles et variait de mille manières leurs lumières incertaines. Le sable aussi contenait un grand nombre de petites pierres ferrugineuses qui brillaient de toutes parts ; c’était la terre de feu, conservant encore dans son sein les traces du soleil, dont les derniers rayons venaient de l’échauffer. Il y a tout à la fois dans cette nature une vie et un repos qui satisfont en entier les vœux divers de l’existence.

Corinne se livrait au charme de cette soirée, s’en pénétrait avec joie ; Oswald ne pouvait cacher son émotion. Plusieurs fois il serra Corinne contre son cœur ; plusieurs fois il s’éloigna, puis revint, puis s’éloigna de nouveau pour respecter celle qui devait être la compagne de sa vie. Corinne ne pensait point aux dangers qui auraient pu l’alarmer, car telle était son estime pour Oswald, que, s’il lui avait demandé le don entier de son être, elle n’eût pas douté que cette prière