Page:Defoe - Robinson Crusoé, Borel et Varenne, 1836, tome 2.djvu/343

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hollandais : je ne suis point interlope. Que peuvent-ils avoir à me dire ? »

Il prit un air moitié colère, moitié plaisant, garda un instant le silence, puis souriant : — « Fort bien, Sir, me dit-il, si vous vous croyez en sûreté, à vos souhaits ! je suis pourtant fâché que votre destinée vous rende sourd à un bon avis ; sur l’honneur, je vous l’assure, si vous ne regagnez pas la mer immédiatement vous serez attaqué à la prochaine marée par cinq chaloupes bien équipées, et peut-être, si l’on vous prend, serez-vous pendus comme pirates, sauf à informer après. Sir, je pensais trouver un meilleur accueil en vous rendant un service d’une telle importance. » — « Je ne saurais être méconnaissant d’aucun service, ni envers aucun homme qui me témoigne de l’intérêt ; mais cela passe ma compréhension, qu’on puisse avoir un tel dessein contre moi. Quoi qu’il en soit, puisque vous me dites qu’il n’y a point de temps à perdre, et qu’on ourdit contre moi quelque odieuse trame, je retourne à bord sur-le-champ et je remets immédiatement à la voile, si mes hommes peuvent étancher la voie d’eau ou si malgré cela nous pouvons tenir la mer. Mais, sir, partirai-je sans savoir la raison de tout ceci ? Ne pourriez-vous me donner là-dessus quelques lumières ? »

« — Je ne puis vous conter qu’une partie de l’affaire, sir, me dit-il ; mais j’ai là avec moi un matelot hollandais qui à ma prière, je pense, vous dirait le reste si le temps le permettait. Or le gros de l’histoire, dont la première partie, je suppose, vous est parfaitement connue, c’est que vous êtes allés avec ce navire à Sumatra ; que là votre capitaine a été massacré par les Malais avec trois de ces gens, et que vous et quelques-uns de ceux qui se trouvaient à bord avec vous, vous vous êtes enfui avec le bâtiment, et depuis