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mourut ; et quoique pendant les dix jours qu’on laissa écouler, selon l’usage, entre la mort du pontife et l’entrée des cardinaux en conclave, il ne se présentât aucune chance qui pût faire croire que le cardinal Pamphile serait élu, cependant dona Olimpia ne cessa pas d’avoir le pressentiment que son beau-frère serait pape. Les âmes passionnées sont toujours superstitieuses. Cette femme, sans cesse préoccupée de la fin toujours prochaine et si souvent ajournée d’Urbain, avait consulté, quatre ans avant sa mort, un astrologue sur ce que le destin réservait au cardinal. La réponse fut que Pamphile serait élevé aux grades les plus éminents de l’Église, lorsqu’il aurait atteint si soixante-dixième année. Il n’en avait alors que soixante-six, et pendant quatre années dona Olimpia fit dire régulièrement des messes pour la conservation de la vie d’Urbain VIII. La coïncidence de la mort de ce pontife avec l’accomplissement de l’âge indiqué par l’astrologue donna une telle confiance à dona Olimpia, que pendant la tenue du conclave, certaine désormais de l’élévation prochaine de son beau-frère, elle fit retirer du palais Pamphile, qu’ils habitaient, toutes les richesses qui y étaient amassées. »

Il faut que vous sachiez, dit l’abbé en s’interrompant, que cette précaution n’était pas inutile, parce que l’usage à Rome est de livrer au pillage de la populace le palais du cardinal devenu pontife. — Est-il possible ? demanda M. de Beauvoir tout étonné. — Oui, c’est une vieille coutume dont on ne conserve guère que la forme, comme vous voyez. Je poursuis.

« Cependant trois partis étaient en présence au conclave, celui des Barberins, neveux du pape défunt, qui désiraient voir porter au trône un homme qui, loin de les poursuivre à cause des grands biens qu’ils avaient assez injustement acquis, les protégeât au contraire contre la haine que leur portait la cour, le clergé et le peuple. Ce parti repoussait naturellement le cardinal Pamphile, ennemi déclaré des Barberins.

» Il était encore exclus par les cardinaux dévoués à la France, parce que le roi très-chrétien, d’une part, soutenait les Barberins, et que de plus, le cardinal Mazarin ne pouvait pardonner à Pamphile l’opposition qu’il avait toujours mise