Page:Delécluze - Romans, contes et nouvelles, 1843.djvu/186

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entendue, dit vivement la princesse. — Vous lui faites injure, madame, reprit Justiniani, à qui la gravité de cette conversation commençait à peser, et si vous aviez été à Rome il y a quelques jours, vous auriez été forcée d’avouer que dona Olimpia a surpassé en élégance et en somptuosité tous les grands seigneurs de Rome et les plus illustres étrangers. — Qu’a-t-elle donc fait ? demanda dom Camille en souriant. — Peu de jours après celui où elle reçut les hommages des cardinaux, des princes romains, des ambassadeurs, et de la fournée Maldaehini, elle a donné une fête splendide à laquelle tout ce qu’il y a d’hommes et de femmes illustres à Rome étaient invités. Vous savez quelle est la splendeur de ces fêtes, et vous y avez assez souvent assisté pour que je ne vous en fasse pas la description. Mais ce qui donna une physionomie toute particulière à celle-là, c’est une comédie qui fut jouée, et je vous laisse à deviner par qui ! — Dites-le-nous tout simplement, Justiniani, interrompit Camille, car la princesse et moi ne sommes pas des sphinx bien habiles. — Vous connaissez le peintre Salvator Rosa, non moins fameux par ses tableaux que par ses satires ? Dernièrement, après avoir fait le coup de fusil en faveur de Masaniello, et s’être échappé de Naples, afin d’éviter d’être pendu, il est revenu à Rome, s’y promenant plus fier que jamais, portant l’épée, et se faisant suivre par des laquais. Vous demandiez tout à l’heure quel intérêt on prend aux affaires de Naples, et vous allez comprendre qu’on ne s’en occupe guère sérieusement, puisque Salvator Rosa, quoique l’un des plus ardents rebelles, a été recherché avec empressement par ce qu’il y a de plus élevé à Rome, sitôt qu’il est revenu de son expédition. C’était à qui l’aurait chez soi pour lui faire jouer des farces. Et dona Olimpia ne voulant pas le céder aux autres en cette occasion, l’a chargé de monter une pièce dont tous les autres acteurs ont été choisis parmi les plus nobles Romains. À parler sincèrement, les princes Lanti et Spada, ainsi que deux ou trois marquis chargés de rôles secondaires, ont paru fort médiocres auprès de Salvator Rosa, qui fut réellement merveilleux dans le rôle de Coviello, au commencement de la comédie.