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éminence (et elle regarda Pancirole) ; mais je serais bien surprise si déjà des mesures sévères n’étaient pas prises pour réprimer, pour punir un excès d’insolence commis avec tant de scandale envers le souverain pontife, dans la capitale des états romains.

— Soyez certaine, excellence, répondit Pancirole avec sa voix cassée, mais du ton le plus calme, que sa sainteté a déjà pourvu à tout, et que sa personne, son nom et son gouvernement ne cesseront pas d’être respectés.

— Et quels moyens comptez-vous employer pour garantir cette promesse ? » À cette question, le trésorier, croyant ne pas devoir répondre, garda le silence, espérant que le pape prendrait la parole ; mais le pontife irrité demeura muet. « Les circonstances sont de nature à ne causer ni incertitude ni embarras sur la conduite que l’on doit suivre, dit dona Olimpia d’un ton tranchant et impérieux : il faut que cette femme sorte de Rome, et avant la nuit ! » Le pape se leva de dessus son siége, et se tournant vers Pancirole : « Vous veillerez, lui dit-il, à ce qu’aucun ordre de cette espèce, si par hasard il était donné, ne reçoive son exécution, et je vous charge personnellement de faire respecter ma volonté. » Après ces mots, Innocent se rassit et appuya sa tête sur l’une de ses mains, comme un homme profondément affecté.

Peu faite à une opposition aussi ferme, dona Olimpia resta pendant quelques secondes interdite, s’efforçant de lire alternativement sur la figure du souverain et sur celle de son ministre quel était celui des deux dont elle sonderait plus facilement la pensée, dont elle vaincrait plus aisément les résolutions. Mais s’étant convaincue, par plusieurs tentatives muettes, que le pape avait l’intention de se retrancher dans un silence absolu, elle reporta ses efforts du côté de Pancirole.

« Enfin ! dit Olimpia en s’adressent à celui-ci, et après avoir fait un effort sur elle-même pour calmer sa colère et dissimuler l’altération de sa voix, que comptez-vous faire ? — Madame, répondit le ministre, les volontés comme les ordres que sa sainteté m’a transmis n’ont rien d’absolu ; ils sont susceptibles d’être modifiés selon ce qui arrivera… — Mais contre ce qui est arrivé, que va-t-on faire ? — Témoigner