Page:Delécluze - Romans, contes et nouvelles, 1843.djvu/224

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désire, ce sera mieux... qu’elle quitte le palais Farnèse, où il se passe des choses que je ne dois pas apprendre avec plaisir... Engagez-la de ma part à habiter son petit palais de la rue du Cours, où elle sera mieux et plus convenablement pour faire ses couches... Quant à ceux qui s’empressent de lui faire des visites, il faut les avertir de mettre un peu plus de discrétion dans leur conduite, s’ils ne veulent pas me déplaire. Et pour apprendre à la plupart d’entre eux ce qui pourrait leur arriver s’ils ne se conformaient pas dorénavant à ma volonté, vous ferez savoir au deux cardinaux Palotta et Capponi que je leur interdis l’entrée du Vatican pendant trois mois. Les ambassadeurs étrangers comprendront ce que cela signifie. Cette mesure vous paraît-elle bonne, Pancirole ? — Très-bonne, saint-père. — Eh bien ! allez. » Le ministre se mettait déjà en marche pour exécuter les ordres qui lui avaient été donnés, lorsque le pontife le rappela d’une voix affaiblie : « Pancirole, lui dit-il, faites venir mes serviteurs pour qu’ils me mettent au lit ; je ne me sens pas bien. »

Le pape, menacé de la pierre depuis bien des années, éprouvait assez souvent, et surtout quand il avait été vivement contrarié, des indispositions de peu de durée, mais assez graves. Ces accidents, qui se renouvelaient cinq ou six fois durant l’année, mettaient ordinairement toute la ville de Rome dans l’agitation par le réveil de toutes les ambitions et de tous les intérêts qui se rattachaient à la durée du règne d’Innocent, ou aux espérances que faisait naître l’élection d’un nouveau pontife.

À peine Innocent fut-il alité, que le bruit qui s’en répandit de tous côtés ne tarda pas à venir jusqu’aux oreilles de dona Olimpia. Il serait sans doute injuste de dire que cette femme n’éprouvait pas pour son beau-frère un attachement que la longue habitude de vivre près de lui aurait suffi pour rendre très-réelle ; mais tant d’intérêts de toute nature se rattachaient encore à la vie de son parent, que lorsqu’il ressentait la moindre indisposition, toute l’existence de dona Olimpia se concentrait dans celle d’Innocent. Chose étrange ! cette femme, dont l’esprit ne s’exerçait ordinairement que sur les spéculations les plus profondes de la politique, ou en