Page:Delécluze - Romans, contes et nouvelles, 1843.djvu/241

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le nouveau Pamphile, profitant alors de l’un des dons les plus heureux qu’il eût reçu du ciel, caressa l’oreille de dona Olimpia avec des paroles si éloquemment débitées, qu’on les eût écoutées machinalement avec plaisir, comme le son d’un instrument. Il fit entendre à la belle-sœur du pontife, qu’inexpérimenté comme il l’était dans les affaires, il se trouverait heureux qu’elle voulût bien daigner le guider dans la carrière, lui ouvrir les trésors de sa sagesse et de son expérience ; que si le ciel avait voulu qu’il occupât le poste qu’on lui avait confié, il ne se faisait aucune illusion sur son importance et ses talents personnels, mais qu’il se regardait seulement comme un instrument que la Providence avait choisi pour exécuter fidèlement et avec le moins d’inhabileté qu’il le pourrait les desseins et les résolutions des personnes que la portée de leur intelligence et la fermeté de leur esprit appelaient naturellement au gouvernement des choses de ce monde. Après cette exposition générale de sa conduite future, le nouveau Pamphile s’adressa en particulier à dona Olimpia pour l’assurer que tout ce qu’il venait d’avoir l’honneur de lui dire sortait de son cœur, et parlant toujours avec plus d’aisance et d’entraînement, il lui fit entendre qu’il serait au comble de la joie si, après avoir reçu ses conseils, profité de ses leçons et exécuté ses volontés, il pouvait espérer qu’un jour elle le rendrait digne de porter l’illustre nom de Pamphile, et de mériter d’être mis au nombre des personnes de sa famille.

Tout en se tenant sur ses gardes contre l’éloquence et la sincérité du cardinal Pamphile, dona Olimpia crut cependant s’apercevoir qu’elle n’avait pas un rival dans le conseil du pape, aussi dangereux qu’elle l’avait craint. Elle lui parla donc avec beaucoup de réserve, ajoutant aux politesses qu’elle lui adressa pour répondre aux siennes : « Je ne suis qu’une femme, éminence, qui n’ai ni les lumières que vous lui prêtez ni le crédit qu’on lui suppose. Mais puisque vous paraissez attacher du prix à mes conseils, et que vous désirez m’être agréable, je résumerai ce que je puis vous dire, en vous recommandant de prendre les intérêts du saint-père avec ardeur, de les défendre avec courage ; je vous en saurai un véritable gré. »