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votre auprès de la sienne. — À mon âge, répondit Olimpia en se tournant gracieusement vers Antoine, on peut se laisser faire des compliments ; aussi suis-je charmée que la vue de cette main, et elle souleva légèrement celle qui portait la bague, ne vous soit pas désagréable... Je sais que vous m’avez comprise, ajouta-t-elle, et vous devez être persuadé que les paroles qui m’ont été dites quand je reçus ce bijou sont restées profondément gravées dans ma mémoire... »

Dona Olimpia en conservant tout son calme, dirigea ses yeux sur le cardinal pour juger d’avance par l’expression de ses traits jusqu’à quel point il était disposé à tenir alors les promesses qu’il avait faites il y avait neuf ans.

« Aujourd’hui, comme lorsque vous voulûtes bien accepter ce témoignage de mon respect, madame, dit tout aussitôt le cardinal, celui que vous avez pu regarder comme votre ennemi serait heureux de pouvoir vous servir. »

Dona Olimpia tendit la main, que le cardinal saisit avec empressement. « Antoine, lui dit-elle, vous voulez me servir ? et moi j’ai la confiance que je pourrai vous être utile. Depuis longtemps je pense qu’en unissant nos efforts nous pourrons donner un plus grand lustre à chacune de nos familles ; car je n’ignore pas que ce but ait été et est pour vous, comme pour moi, celui de tous les travaux de notre vie.

» J’ai été rigoureuse, cruelle envers vous ; mais la haute intelligence avec laquelle vous avez gouverné les affaires sous le règne de feu votre oncle me dispense de faire l’apologie des actes que j’ai cru devoir provoquer. Le propre des âmes fortes, des esprits supérieurs, est de pouvoir juger avec calme et équité des choses qui blessent le plus vivement leurs intérêts privés. Innocent X à son exaltation n’avait d’autre moyen de gagner la faveur des gens de cour et du peuple qu’en obéissant à la clameur unanime qui s’élevait contre les actes de l’administration précédente. C’est moi-même, vous le savez, qui ai conseillé, provoqué les rigueurs que l’on a exercées contre votre famille, contre votre personne même ; mais ce que vous n’ignorez pas non plus, je le suppose au moins, c’est que dès que les circonstances devinrent opportunes, je plaidai votre cause, j’obtins