Page:Delécluze - Romans, contes et nouvelles, 1843.djvu/343

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sera bien reçue en ce moment à Venise. — C’est une attention que je ne manquerai pas d’avoir pour la sérénissime république, puisqu’elle traite si bien nos amis, » répondit le pape en souriant. Antoine inclina la tête en signe de remercîment, au même moment que dona Olimpia recommanda au saint-père Baccio Aldobrandini. « Ah ! c’est le protégé de votre bru, observa Innocent ; mais il y en a un autre auquel je crois qu’elle tient plus encore, monseigneur François de Gondi, ce prélat qui préoccupe et agite tout le monde ici, quoiqu’il soit absent. Je n’ai jamais connu d’homme qui eût tout à la fois des amis et des ennemis aussi actifs. » Antoine, après avoir laissé lire sur sa physionomie qu’il méditait une observation, dit enfin : « J’ignore quels sont les projets de sa sainteté à l’égard de M. de Retz ; mais son élévation au sacré collège ne sera pas agréable à M. le cardinal Mazarin. — Eh ! je le sais bien, dit le pape avec humeur ; mais je suis fort embarrassé. Le jeune roi et la régente me la demandent. Si vous saviez ce qu’il y a eu d’intrigues à Rome depuis un mois, à propos de toute cette affaire, vous me plaindriez d’avoir eu à les déjouer ! Enfin, la princesse de Rossano est pour lui ; un certain abbé Charrier lui a persuadé que le salut de la France dépend de ce chapeau donné ou refusé à Gondi, et la pauvre petite femme ne me pardonnerait pas de l’abandonner dans cette affaire, où elle s’est imprudemment engagée. — Eh bien, mon frère, dit dona Olimpia en faisant un signe des yeux à Barberin pour l’engager à céder, puisque vous croyez que ce serait obliger la couronne de France que d’accorder la faveur que l’on demande pour M. de Gondi, laissez-vous aller. D’ailleurs, ajouta-t-elle en adoucissant le son de sa voix, vous serez agréable à la princesse de Rossano ; faites cela pour elle. »

Rien ne chatouille plus agréablement la vanité d’un homme que de lui persuader qu’il a la puissance de faire cesser les petites jalousies qui règnent entre les personnes qui l’entourent ; aussi Innocent fut-il touché presque jusqu’aux larmes, de la bienveillance et de la tendresse que dona Olimpia témoignait pour sa belle-fille. Il jeta sur sa sœur un regard où se peignit si vivement la satisfaction in-