Page:Delécluze - Romans, contes et nouvelles, 1843.djvu/461

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

français, quels que fussent le mérite des interlocuteurs et le choix des sujets.

Ce fut à la suite d’une de ces réunions turbulentes, que, dégoûté des platitudes qu’il avait entendues, il se souvint de la lettre que M. de Chantelou lui avait donnée pour un peintre français. Le nom du Poussin ne lui était pas resté dans la mémoire ; mais l’idée de voir un homme de son pays avec lequel il pourrait causer à l’aise dans sa langue, le décida à faire dès le lendemain la commission de M. de Chantelou.

Muni de la lettre, le jeune de Beauvoir alla donc se présenter chez M. Poussin, peintre du roi de France. Il heurta à la porte, que l’on n’ouvrit pas d’abord, car à travers un trou grillé une femme demanda en italien qui était là et ce que l’on voulait. Avec cette confiance naïve qu’ont les enfants de la France, qu’ils doivent être compris partout, M. de Beauvoir, après avoir décliné son nom, répondit en français qu’il était chargé par M. de Chantelou de présenter ses civilités à M. Poussin et de lui donner une lettre de sa part. Un petit colloque qui s’était établi dans l’intérieur retint M. de Beauvoir quelques instants dehors, jusqu’au moment que la personne qui l’avait interrogé lui ouvrit et le fit entrer, en murmurant quelques mots de politesse en français. Sans porter attention à madame Poussin, à qui la simplicité de son vêtement et l’office qu’elle venait de remplir donnaient l’apparence d’une femme de service, le gentilhomme français alla droit à M. Poussin, qui se tenait au haut de quatre marches conduisant à son atelier. M. de Beauvoir tira la lettre de dessous son manteau, et la montrant de la distance où il se trouvait encore, il dit à l’artiste l’objet de sa visite, en s’excusant de ce qu’il avait tardé à satisfaire les intentions de M. de Chantelou. Ce nom fut si agréable à l’oreille de M. Poussin, qu’à la gravité habituelle de son visage succéda le sourire le plus gracieux. Porteur d’une lettre d’un de ses plus chers amis, M. de Beauvoir fut aussitôt introduit dans l’atelier, lieu où ne pénétraient que ceux qui avaient la confiance particulière du peintre.

Le Poussin, car on a de la peine à rhabiller de qualifica-